En prévision de l'invasion des troupes contre-révolutionnaires Prussiennes et Autrichiennes, le 11 Juillet 1792, l'Assemblée Législative avait déclaré " la patrie en danger " ce qui avait produit dans toute la France une émotion intense. De partout affluèrent des volontaires. Ceux venant de Marseille entonnèrent tout au long de leur marche vers Paris le " Champ de guerre de l'armée du Rhin " (que le capitaine Rouget de Lisle avait composé à Strasbourg dans la nuit du 25 au 26 avril 1792) et qui devint " la Marseillaise ".
Le 2 septembre 1792, Danton avait fait à l'assemblée sa célèbre harangue patriotique "... Pour vaincre Messieurs, il nous faut de l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace, et la France est sauvée "
Cet enthousiasme conduira aux victoires de Valmy et Jemmapes, respectivement les 20 septembre et 6 novembre 1792.
Bas Relief de la bataille de Jemmapes sur l'arc de triomphe de l'Étoile, par Carlo Marocchetti ( Crédt : WIKIPEDIA )
Pour faire face à la baisse des effectifs de l'armée due aux pertes et aux départs massifs des volontaires levés en juillet 1792, qui estimaient pouvoir rentrer chez eux car l'ennemi avait été repoussé hors des frontières, les "Girondins" à la tête de la "convention" décident de réagir en renforçant les effectifs et le 23 février 1793 la Convention décide la " levée en masse " de 300.000 hommes.
Elle consista à enrôler au tirage au sort des hommes de tous les départements de France, pris parmi les célibataires de 18 à 25 ans. Ce procédé provoqua un fort mécontentement paysan ( des foyers insurrectionnels vont fleurir dans beaucoup de régions ) qui, sur un fond de chouannerie, sera l'élément déclencheur de l'effroyable Guerre de Vendée.
La déroute de Cholet, par Jules Giradet
( Crédit : WIKIPEDIA )
Le malaise fut surtout perceptible dans les régions très catholiques où la population cachaient de nombreux prêtres réfractaires qui avaient refusé de prêter serment à la " Constitution Civile du Clergé ", votée le 12 juillet 1790 par l'Assemblée Constituante.
Dans notre région, les émeutiers parcourent les communes d'Augerolles, Olmet, Aubusson d'Auvergne, Vollore-Chignore ( qui deviendra Vollore-Ville en 1795 ) et Vollore-Montagne en incitant les jeunes appelés à ne pas se présenter au tirage au sort et en essayant de les enrôler dans leur troupe. Malgré une certaine opposition, le mouvement prend de l'ampleur et le 14 mars 1793 les appelés d'Augerolles sont empêchés d'entrer dans l'église où l'on devait procéder au tirage au sort. Des pourparlers ont lieu sans résultat et les deux commissaires représentant le district de Thiers doivent partir bredouilles. Les mêmes évènements se répètent le lendemain à Vollore-Chignore, où les commissaires doivent prendre la fuite, et à Aubusson où les révoltés, brandissant des armes à feu et des gros bâtons, menacent leurs opposants.
Les rebelles s'organisent en vue des deux tirages au sort programmés pour le lundi 18 mars à Vollore-Chignore et à Courpière, et décident que dans un premier temps ils iront pourchasser les commissaires à Vollore-Chignore, avant de marcher sur Courpière. Ils vont tout d'abord récupérer des armes au Château des Grimardies et se livrent au pillage de tous les instruments agricoles pouvant être utilisés comme arme blanche. Sur le retour, ils se font donner des fusils dans les fermes.
De leur coté, les autorités prennent des mesures et le dimanche après-midi deux cents hommes de la garde nationale de Thiers, munis de deux canons, investissent le bourg de Vollore-Chignore.
Le lundi 18 mars 1793, à huit heures, les commissaires et la municipalité de Vollore-Chignore prennent place dans l'église dont les deux portes sont gardées par des sentinelles, les canons prenant les deux rues principales en enfilade. Il ne manque que sept célibataires sur plus de deux cents appelés et le tirage commence.
Tout se passe bien, lorsque soudain l'on entend des cris : la troupe des insurgés est signalée au sud du bourg. Les opérations de tirage au sort sont suspendues et le citoyen Bizet qui commande la garde envoie deux escouades d'une dizaine d'hommes sur les flancs de la colline et se porte face aux séditieux avec un trentaine d'hommes qu'il dissimule dans un repli du terrain. Les insurgés qui comptaient sur l'effet de surprise sont pris au dépourvu lorsque la garde nationale se découvre. Jean Aiguebonne, métayer au hameau de la Borie, met en joue mais son fusil fait long feu. La fusillade éclate, Jean Aiguebonne est blessé et c'est la débandade : on fuit à toutes jambes vers les bosquets proches. Sept insurgés sont faits prisonniers, dont une femme. Coté garde nationale il n'y a pas de blessé et le calme étant revenu le tirage peut reprendre.
Ces troubles peuvent être qualifier de " simples incidents " en comparaison du massacre de Machecoul qui débuta le 11 mars 1793 et fit environ 600 victimes en un mois.
Le Massacre de Machecoul, peinture de François Flameng, 1884
( Crédit : WIKIPEDIA )
Toutefois, la suite fut plus tragique puisqu'à la suite des poursuites qui furent engagées, soixante dix-sept arrestations eurent lieu et le 19 mai 1793, après treize jours de séance, le tribunal de Clermont qui s'était déplacé à Thiers condamna à mort quatorze insurgés :
- cinq parmi les personnes emprisonnées, dont trois seulement seront guillotinés sur une place de Thiers ( Augusin Desormières, originaire de Cusset - Gilbert Bourgade et Jean Goutte-Gatta, métayer du Naud ). Les deux autres ( F. Chouvel et Pierre Poyet ) auront la vie sauve.
- neuf par contumace qui ne furent pas arrêtés : leurs biens furent confisqués et déclarés acquis à la République.
Huit autres détenus furent transférés à la prison de Riom et les autres furent acquittés ( parmi eux : Annet Garret, de Rossias - Benoît Chambon, d'Archimbaud - Dumas, fils du maire et Jean Decombat, laboureur à la Chapelle-Trinquart ).
Le calme revint rapidement dans la région et il n'y eu pas d'autres soulèvements.
- Source : Bulletin Municipal n° 20 de juin 2005